SHAFIQ HUSAYN "SHAFIQ EN' A-FREE-KA"

Plug Research (2009)

HIP-HOP  – RAP

KH8592 (disponible au Discobus 4)

Certains morceaux vous obsèdent. Le disque où ils apparaissent n’est malheureusement pas toujours du même acabit. Parfois un disque par ailleurs médiocre renferme plusieurs de ces perles en son sein, ensorcelant nos oreilles. Voici donc quelques-uns de ces petits bijoux dénichés au détour du dernier disque de Shafiq Husain.

Le producteur de Cleveland peut s’enorgueillir d’avoir pondu quelques perles ces dernières années (d’Erykah Badu récemment, à Ice-T début des années nonante, en passant des collaborations avec Prince ou… Duran Duran!); et le voici signé sur le label américain Plug Research, connu pour son goût prononcé de l’expérimentation (Daedelus, Flying Lotus, et autres Quadron…). Aventureux sera donc le maître mot. Et tant qu’à faire autant commencer par le Nirvana, seconde plage de l’album. Beats hypnotiques et hybrides, mélange de hip-hop et de percussions orientales, basse funk, percées de cuivres, inflexions jazz, imprécation mystique et métaphorique, gimmick d’effet saturé… Ovni musical en développement, le morceau tournoie, les voix emportant l’auditeur dans une sorte de transe insidieuse célébrant le Tout-Puissant.

Déclinant par la suite des thèmes plus plats – ballades appuyées de voix féminines et autres délires soul-funk psychédéliques pas toujours très heureux – le disque déçoit avant de se réveiller et de retrouver la splendeur de ses débuts. On retiendra particulièrement l’excellentissime Evil Man, paradoxe absolu d’un disque qui n’en manque pas. Sombre et lumineux à la fois, oppressant et diablement jouissif, les voix se fondent et prennent leur place dans un décorum sonore où se télescopent joyeusement accords de piano basiques, sonorités électroniques cheap et montées rock. L’hypnose opère à nouveau.

Viendront également titiller nos oreilles le très bon No Moor à la basse puissante et au funk appuyé, le rap apocalyptique de All Dead ou le lunaire The Odd Is C,…. D’autres titres se détachent encore (Major Heavy ou Love Still Hurt notamment), mais l’overdose d’effets ou la platitude du propos gâchent quelque peu le plaisir. En fait, cet album regorge de trouvailles, surprenant autant qu’il agace dans ses creux. Cerise sirupeuse sur le gâteau, l’incursion francophone de Le’Star pour une décomplexante romance toute en douceur. Et alors que Rebel Soldier clôture cet album pour une dernière collision funk spatiale pleine de superbe, un constat s’impose: lorsque l’instrumentation mène le bal, laissant aux voix un rôle secondaire, la machine et le synthé ronronnent; quand les vocaux prennent le dessus, le résultat se fait moins probant. Et lorsque Shafiq trouve son ton, ses expérimentations font des merveilles…     PL

(Disponibilité de ce CD)

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